Tout ce qui est excessif est insignifiant disait Talleyrand. C’est vraiment le moins que l’on puisse exprimer après l’insultant discours de Monsieur Köppel lors de la dernière assemblée des délégués de l’UDC à propos de la SSR.
Nous avons assisté à une véritable entreprise de destruction envers l’institution, mais surtout envers son personnel et surtout, ses journalistes. Affirmer que la SSR s’est spécialisée dans le lèche-botte du Conseil fédéral, que la SSR est un monopole qui profite de redevances recouvrées par l’Etat, et que les erreurs professionnelles ne sont pas une exception mais plutôt une règle de travail soutenue par l’Etat relève de la pure divagation, pour ne pas dire hystérie… La construction particulière de notre service public prend en compte tous les dangers que pourraient représenter une radio et une télévision d’Etat : le fait même que la redevance soit versée directement à la SSR et aux radios et télévisions privées prive justement l’Etat d’une influence directe et la loi sur la radio et la télévision (LRTV), votée par le Parlement, assure l’indépendance totale de la SSR face au gouvernement.
Par ailleurs, Monsieur Köppel se permet d’accuser ses collègues journalistes de pourvoyeurs de fake news qui n’auraient pas été inventées par Donald Trump, mais bien par la SSR ! De plus, il compare l’institution au Volksempfänger de Goebbels, aux monopoles médiatiques manipulateurs du temps de l’URSS et de la RDA ! Pauvre peuple suisse !
Il est évident que, lorsque l’on prône une communication disruptive telle que celle pratiquée par la Weltwoche, on ne peut accepter une SSR consciente de son rôle relatif au maintien de la cohésion nationale, au respect des minorités linguistiques et à une information adaptée aux particularités qui font de la Suisse ce qu’elle est aujourd’hui. En s’exprimant de la sorte, Monsieur Köppel se débarrasse de ses responsabilités d’élu au niveau national pour se faire l’avocat d’un parti, certes important mais nullement majoritaire. Il est trop facile de prétendre que les journalistes s’occupant de l’actualité à la SSR sont composés d’une majorité de « gauchistes pro-européens » susceptibles de manipuler l’opinion dans un sens contraire à ses convictions. Il est trop facile de prétendre que la SSR doit se conformer à notre économie de marché moderne et performante et se libérer de la tutelle de l’Etat lorsque l’on ne se soucie guère des immenses répercussions que cela aurait pour les 13’500 places de travail dépendant directement ou indirectement de la SSR en Suisse, en effaçant ainsi à jamais de multiples compétences techniques, culturelles et artistiques dans le pays.
Jean-Bernard Busset